Page:Langlois - Harivansa ou histoire de la famille de Hari, tome 1.djvu/136

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

duit par les Gandharvas, parcourt tout l’appartement. Ce rayon de lumière a montré Pouroûravas nu aux yeux de son épouse, et la belle Apsarâ a disparu soudain. Les Gandharvas, voyant le succès de leur ruse, retournent au ciel, et le roi, qui a retrouvé les deux béliers, revient dans son appartement ; mais Ourvasî n’y est plus. Le malheureux pousse des cris de douleur : il parcourt la terre, cherchant de tous côtés l’épouse qu’il a perdue. Enfin dans le pays de Couroukchétra, il l’aperçoit sur l’étang sacré de Plakcha[1], au moment où elle se baignait dans ses ondes fraîches, et se livrait avec cinq autres Apsarâs à de joyeux ébats. Ourvasî folâtrait, et lui, il était en proie au chagrin. Il la voit toujours brillante de mille attraits : elle aussi le voit à peu de distance, et dit à ses compagnes en le leur montrant : « Voilà le héros qui m’avait accueillie dans son palais. » Celles-ci étaient toutes frappées d’étonnement. Le roi prend alors la parole : « Épouse que j’adore, rends-moi ton amour, et réponds à ma voix. » Ils échangent ensemble mille tendres discours. Entre autres, Ourvasî lui dit : « Prince, je porte dans mon sein un gage de ton amour. D’année en année je te donnerai un fils ; mais il ne me sera permis de rester avec toi qu’une seule nuit. » Le roi, content de cette assurance, retourna dans sa capitale. Au bout de l’année, Ourvasî vint le visiter, et une seule nuit fut accordée à leurs amours.

Ourvasî dit un jour au fils d’Ilâ : « Les Gandharvas veulent t’accorder une faveur. Tu peux choisir, et t’adresser à eux avec confiance. Ô grand roi, demande de ressembler aux Gandharvas. » Tel fut le vœu que forma Pouroûravas, et ceux-ci le lui accordèrent. Ils remplirent un vase de feu, et lui dirent ; « Emploie ce feu pour le sacrifice, ô roi, et tu obtiendras d’habiter avec les Gandharvas. »

Pouroûravas, emmenant avec lui ses fils, entra dans sa capitale et se rendit à son palais ; cependant le feu qu’on lui avait donné était au sein de l’arani[2] ; et à son arrivée, à la place de ce feu, il vit avec étonnement une branche d’aswattha[3], insérée dans un morceau de bois de samî[4]. Il se plaignit aux Gandharvas que le feu se fût éteint : alors ceux-ci lui enseignèrent

  1. Plakcha est aussi le nom d’une des sept provinces qui partagent le monde.
  2. Le lecteur se rappelle que l’arani est l’instrument avec lequel les Brahmanes font le feu pour les sacrifices. Voy. ve lect. note 9.
  3. Ficus religiosa.
  4. C’est ainsi que j’ai traduit l’épithète difficile शमीजात​. Le samî est, suivant M. Wilson, l’acacia suma.