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Page:Langlois - Harivansa ou histoire de la famille de Hari, tome 1.djvu/189

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La possession de ce trésor excita la jalousie contre Praséna. Govinda[1] devint maître de cette pierre : mais, malgré sa puissance, il n’avait jamais eu U pensée de la prendre ou de la ravir. Un jour Praséna, partant pour la chasse, s’en était orné. Un lion[2], errant dans la forêt, le tua pour la lui enlever. Le roi des ours (Rikcharâdja)[3] rencontra ce lion qui fuyait : il lui donna la mort, prit la pierre, et se retira dans sa caverne. Les Vrichnis et les Andhacas, apprenant la mort de Praséna, soupçonnèrent d’abord Crichna, qui autrefois avait paru désirer le Syamantaca. Crichna, constamment animé de l’amour du devoir, leur répondit qu’il n’était point l’auteur de cet accident, et qu’il retrouverait la pierre précieuse. Il se rendit dans la forêt, où Praséna avait dirigé sa chasse. Avec ses compagnons fidèles, il rechercha les traces de ce prince ; il parcourut avec soin le mont Rikchavân[4] et le mont Vindhya : enfin accablé de fatigue, le sage Crichna trouva le cadavre de Praséna et celui de son cheval ; mais la pierre avait été enlevée. A quelque distance, il vit le lion tué par le roi des ours, et à la marque des pas il reconnut sous quel ennemi ce lion avait succombé. Mâdhava suivit les traces qu’il voyait sur la poussière, et arriva à la caverne de ce roi, nommé Djâmbhavân. Il entendit alors dans l’intérieur la voix d’une femme, d’une nourrice, qui prenant l’enfant du prince, et le faisant jouer avec la pierre précieuse, lui disait : « Ne pleure pas, bel enfant ; le lion a tué Praséna ; Djâmbavân a tué le lion. Ne pleure pas, le Syamantaca est à toi. »

En entendant ces mots, Crichna entra, sans rien dire, dans la caverne du roi des ours, faisant placer à la porte les Yâdavas, et son frère armé du soc guerrier[5]. Lui-même s’avança, son arc à la main, et aperçut Djâmbavân.


    était la même chose que cette pierre merveilleuse appelée par les Indiens soûryacânta, et que nous prenons quelquefois pour le cristal ; ou bien un ornement royal, marque distinctive de l’autorité, que tous ces princes se disputaient.

  1. Govinda, et plus bas Mâdhava, sont des surnoms de Crichna.
  2. Le mot सिंह​ sinha, qui veut dire lion, s’applique également à un prince guerrier.
  3. Rikcharâdja peut aussi se traduire par roi du Rikcha ; et en effet, nous verrons tout à l’heure Crichna parcourir cette montagne.
  4. C’est la partie orientale des monts Vindhyas, dont la partie méridionale est spécialement désignée par le nom de Vindhya.
  5. Bâlarâma, Baladéva ou Balabhadra, frère de Crichna, porte dans les combats une arme en forme de soc qu’il lance au milieu des rangs de ses ennemis, tandis que Crichna porte quelquefois un tchacra ou disque dont le bord est aiguisé et tranchant.