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Page:Langlois - Rig Véda.djvu/15

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PRÉFACE.

l’évidence. Et si, de ces pays lointains et de ces temps reculés nous descendons jusqu’à nos jours, nous trouvons la même démonstration et la même confirmation dans toutes les contrées et à toutes les époques. L’Italie, poétique et généralisatrice, par ses origines greco-romaines, se fait l’intelligente auxiliaire de la renaissance des lettres et des arts ; l’Allemagne, presque aussi mystique que les Aryas primitifs, douée en même temps et de l’instinct de la recherche, et du besoin d’approfondir chaque idée, suscite la réforme religieuse, que nous considérons ici dans son résultat purement scientifique, et ouvre de nouvelles issues à la philosophie et à la science du droit ; l’Angleterre, aussi industrieuse que les Phéniciens, aussi positive que les Romains, étend le domaine des applications utiles ; la France, enfin, avec sa facilité étonnante de compréhension et d’assimilation, vulgarise au bénéfice du monde entier l’œuvre de tous. De même que pour le blé, l’agriculteur trace le sillon, sème le grain, coupe l’épi mûr, le bat et le passe au crible, de même les semailles et la récolte des idées ont exigé les travaux variés et multiples de tous les peuples, ouvriers providentiels, chargé chacun d’une tâche spéciale, d’après ses aptitudes différentes.

Mais l’ouvrier n’a eu pendant longtemps aucune conscience de son œuvre. Chaque nation a cru qu’il y avait exclusivement en elle la force de vivre, le droit de contraindre, et la sève pour féconder. Ce n’est qu’aujourd’hui, après l’éclosion des idées internationales chez presque tous les peuples, que nous pouvons entrevoir dans les produits de l’intelligence à travers les siècles, non-seulement une œuvre d’ensemble, mais de continuité, démontrée par des foyers, au rayonnement progressif, aux périodes régulières formant cycle, le développant, se complétant les uns par les autres, et ne s’éteignant qu’après avoir allumé ailleurs un plus vaste foyer.

L’Orient, nous l’avons dit, enfante la civilisation, que les Phéniciens apportent en Grèce, et les Grecs à Rome. Au moment où la Grèce perdait, sous Alexandre, sa force productive avec la liberté, Rome, exclusivement politique et conquérante, n’avait aucune des aptitudes nécessaires à conserver et à développer les traditions orientales. Il fallait qu’un autre foyer vint luire quelque part. Alors, sur une langue de terre presque inhabitée, entre la Méditerranée et le lac Maréotis, fut bâtie Alexandrie, au moment où son fondateur, par ses conquêtes en Asie, lui ouvrait des contrées mystérieuses et immenses, dont elle était destinée à conserver les traditions intellectuelles, par une double fusion d’idées, entre l’Orient et la Grèce d’abord, entre le monde ancien et le monde nouveau ensuite.

Le monde nouveau date de l’avénement du christianisme. À l’époque où Jésus-Christ parut, l’Asie, déjà vaincue par une poignée d’hommes sous Alexandre, ne possédait plus d’éléments utiles à la civilisation générale : la