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[Lect. V.]
INDE. — POÉSIE LYRIQUE.

offrandes, ce dieu possesseur de tous les biens, qui est un ami et un soutien pour tous les êtres, même pour les dieux.

2. Les Bhrigous, honorant Agni, l’ont établi au séjour des ondes (célestes) ; et, en second lieu, au milieu du peuple d’Ayou. Que le maître des dieux, qu’Agni aux rapides coursiers triomphe de tout.

3. Les Dévas, destinés à disparaître, ont constitué Agni au milieu de la race humaine comme un ami véritable. Qu’il répande donc ses flots de lumière, et que de son foyer il comble de biens son serviteur !

4. On aime à honorer ce dieu, qui est comme votre bien ; on aime à le voir grandir, et produire ses lueurs. Sur la ramée il agite ses flammes, comme le cheval attelé à un char agite ses crins.

5. Au moment où mes chantres célèbrent la grandeur (d’Agni), (le dieu) prête aux enfants d’Ousidj[1] une couleur aussi éclatante que la sienne[2]. Les offrandes donnent à sa flamme des teintes variées, et sa jeunesse semble à chaque instant se renouveler.

6. S’acharnant sur le bois qu’il dévore, il brille ; il court comme l’eau, il résonne comme un char. Il trace en brûlant un noir sentier. Il plaît comme un ciel qui sourit entre ses nuages.

7. Puis il s’étend, et va brûler la terre ; il se lance ainsi que le troupeau sans pasteur. Agni, en jetant des flammes, consume, noircit, dévore les plantes.

8. Quand, le matin, nous implorons ton secours ; quand, dans le troisième sacrifice[3], nous t’adressons nos prières, donne-nous, ô Agni, de vaillants compagnons, une heureuse abondance, une belle famille et de vastes richesses !

9. Agni, pour que les enfants de Gritsamada, qui t’honorent dans ton foyer, puissent vaincre leurs voisins, qu’ils aient de braves guerriers, que par toi ils obtiennent des succès ! Donne aux chefs de famille et à ton chantre ce fruit de leurs œuvres.


HYMNE XIII.

À Agni, par Somahouti.

(Mètre : Anouchtoubhî.)

1. Il vient de naître (le dieu) qui présente l’holocauste[4] et qui annonce (le sacrifice), le père dont le secours peut sauver ceux qui ont été ses pères[5]. Qu’il nous accorde une opulence capable de nous donner la victoire. Puissions-nous devenir forts pour prix de nos offrandes !

2. Avec lui, chef du sacrifice, sont sept guides resplendissants[6] ; et le (dieu) qui purifie l’offrande[7] fait lui-même le huitième, venant, être divin, en qualité de Manou[8].

3. Si des prières sont adressées au (dieu) qui supporte (l’œuvre pieuse )[9], alors il les prend et les embrasse toutes, comme la jante embrasse la roue d’un char.

4. Avec la sainte cérémonie est né le saint héraut (du sacrifice)[10], qui en suit sagement les diverses parties, comme (l’oiseau parcourt) les branches (d’un arbre).

5. Les (rayons), vaches lumineuses du dieu qui dirige (les pieuses pratiques)[11] embrassent sa forme brillante, et se colorent aux feux des trois sœurs[12] qui sont accourues au sacrifice.

6. Si la sœur de celui qui contient (les libations)[13] se présente portant le beurre (sacré), le (dieu) occupé des rites salutaires[14] se réjouit en voyant arriver ces (offrandes), où l’orge (tombe) comme la pluie.

7. Que le (dieu) qui observe le moment favorable[15] serve volontairement de prêtre à son serviteur. Puissions-nous recueillir le fruit des hym-

  1. Les enfants d’Ousidj sont les descendants de Cakchîvân, ou bien le mot Ousidj doit s’entendre comme synonyme de prêtre.
  2. C’est-à-dire que les reflets du feu se répandent sur les officiers du sacrifice.
  3. Le sacrifice du Soir.
  4. Hotri. Le poëte, dans cet hymne, emploie sept expressions différentes, affectées aux diverses fonctions du prêtre. Je tâche de les traduire par une périphrase qui en explique la racine.
  5. Les prêtres viennent de produire le feu : ils sont ses pères, et lui, en les protégeant, se montrera leur père.
  6. Guides aurait dû être mis au féminin : car rasmi signifie à la fois rênes et rayons. Or, ces sept guides ou rayons, ce sont les sept officiants qui prennent part au sacrifice (hotraeas).
  7. Potri.
  8. Agni, dans le sacrifice, naît et meurt ; il est considéré comme un Manou, comme un mortel.
  9. Dadhanou : ce mot m’a semblé un des sept noms affectés aux ministres du sacrifice.
  10. Prasastri.
  11. Nechtri.
  12. Ces trois sœurs sont les flammes des trois feux garhapatya, ahavanîya dakchina. Voy. page 47, col. 1, note 4.
  13. Je rends ainsi le mot masculin matri, vase qui mesure, qui renferme la libation. Ce mot signifie aussi l’homme, le père de famille qui mesure, qui compose le sacrifice. Le commentaire voit ici un nom féminin, et le rapporte à l’enceinte du sacrifice (védi). Cette sœur, dont il est ici question, est la cuiller (djouhou) qui sert aux libations. On peut bien encore donner le nom de matri (mère) au réservoir des ondes du sacrifice.
  14. Adwaryou.
  15. Ritwig.