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fables

 À son compagnon d’existence
 Dont la misérable pitance
Ne pouvait, à coup sûr, faire des envieux.

 Ce dernier était vieux ;
Il avait le poil long et la croupe pointue,
 L’oreille rabattue,
La robe d’un gris sale et de la cire aux yeux :
 Il était chassieux.
On l’appelait souvent, et sans plaisanterie,
 Le paria de l’écurie.
 L’autre était bien traité,
 Étrillé, puis frotté ;
Il mangeait de l’avoine et portait couverture,
Revêtait harnais blanc, traînait belle voiture.

Le vieux se plaignait-il ? Je ne dirai pas non.
Il se plaignait un peu quand, après la journée.
 Il comparait sa vie infortunée
Au destin glorieux de son gai compagnon.
Mais celui-ci, prenant des allures malignes,
Lui répondait alors, en soufflant du naseau,
Ce que nous avons lu dans les premières lignes
 De notre fabliau.