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LE NOM DANS LE BRONZE

l’épouser mais je suis si malheureuse que je voudrais mourir…

Il n’offre aucune consolation. Il vient s’asseoir près d’elle, l’entoure de ses bras, la laisse pleurer, appuyée sur lui. Dans le silence, leur amitié fraternelle se reconnaît soudain plus profonde, presque meilleure que l’amour, parce que ce sentiment muet et tranquille, rien ne pourra le changer.

Quand Marguerite est apaisée, Jean lui parle :

— Je ne disais rien, mais je n’aimais pas l’idée de ce mariage. Pendant la guerre, tu étais trop jeune, tu ne peux pas savoir, au moment de la conscription, quand il y a eu des différends entre Canadiens anglais et Canadiens français, Steven a cessé un temps d’être notre ami. Dans les discussions, il se séparait naturellement de nous, redevenait l’étranger. Plus tard, tout cela s’est oublié ; mais la même situation peut se présenter de nouveau, d’autres événements surgir, et alors… Nous ne nous ressemblons pas, nos deux races s’opposent. Ton bonheur aurait été à la merci des conflits politiques, scolaires, que sais-je ?