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Page:LeNormand - Le nom dans le bronze, 1933.djvu/160

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LE NOM DANS LE BRONZE

le ciel et les nuages ; la proue plonge et la mer diverse, splendide, chatoyante reparaît devant elle.

De l’autre côté de cette mer l’attend une existence nouvelle, dans les pays inconnus et magiques. Mais elle aime cette fausse somnolence du bord, que la pensée et le rêve peuplent et animent à leur gré. Son chagrin subsiste, vivace, au creux de son cœur douloureux. Parfois, il se dresse, tyrannique et violent. Mais le plus souvent, elle s’amuse à songer au passé. Elle éprouve une amère douceur à se souvenir de ses dix-huit ans tout frais, de son attente optimiste du bonheur, de ces matins lumineux qu’elle croyait chaque jour précurseurs de joies extraordinaires. Steven était survenu et l’enchantement de l’amour avait confirmé sa foi dans la vie. Elle revoit plus nettement que sa figure des derniers temps cette physionomie qu’il avait pour elle, quand elle ne l’aimait pas encore et que, lui, la choisissait parmi les autres. Que ces premières heures d’un sentiment qui ne se connaissait pas avait eu de charmes subtils. D’autres impressions pouvaient-elles surpasser cette suavité ? Elle en rêve, les yeux