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LE NOM DANS LE BRONZE

Son extrême jeunesse ne conçoit aucune consolation capable d’adoucir l’amertume de ces jours désolés. Elle ne se mariera pas, elle n’aimera personne. Elle n’aura ni maison, ni enfants. Cet évanouissement subit d’un bonheur probable, éteint en elle la lumière si forte de ses espérances. Elle s’apitoie sur son sort et pleure la grande pitié de sa jeunesse vouée au chagrin. L’imagination avivée, elle se voit dans dix ans, quinze ans, et elle entend les gens dire d’elle ce qu’ils ont dit d’autres, en sa présence :

— Non, elle ne s’est jamais mariée. Toute jeune, elle a eu une déception et ne s’en est jamais consolée.

Et ses larmes reprennent plus abondantes.

Puis elle se redresse, retrouve son optimisme. Le cauchemar qui l’a désespérée se dissipera bientôt. Ce n’est pas possible que tout finisse ainsi. Elle se défendra. Elle aime trop Steven pour le perdre sans lutter. Elle le persuadera de se convertir, et ensuite qui pourra les blâmer de s’unir ? Pourquoi sacrifier leurs deux vies à des préjugés ? Steven est bon, honnête, intelligent, elle n’est pas coupable de l’aimer, pourquoi souffrirait-elle ? Mais, c’est lui qui a pro-