Page:LeNormand - Le nom dans le bronze, 1933.djvu/93

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Depuis trois jours qu’elle séjourne à Québec, Marguerite éprouve déjà beaucoup de sentiments exceptionnels ; et une envahissante fierté les domine tous. Longtemps, elle a pensé en secret qu’il n’était pas très glorieux d’être canadienne-française. Petite fille, lorsqu’elle lisait encore la Semaine de Suzette, elle désirait être Française de France, et se plaisait à imaginer des circonstances qui permettraient à toute la famille de retourner au pays des ancêtres. Plus tard, le prestige anglais l’a éblouie. Nous sommes quelquefois à côté d’eux si peu brillants, si peu riches.

Mais soudain, ce prestige diminue en proportion de l’éclat que donne à sa propre race ce qu’elle a sous les yeux. Avec Louise, avec Philippe, elle va tous les jours s’appuyer à la balustrade de la terrasse. Plus que le luxueux et écrasant Château Frontenac, — quoique son emplacement soit celui du Fort Saint-Louis d’autrefois, — la vue splendide des alentours l’émeut.