Page:Le Parnasse contemporain, III.djvu/145

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Tu ne me comptes plus, Jésus, parmi les tiens.
Que l’âpre désespoir dessèche mes paupières
Et cuise comme un feu mes lèvres sans prières ;
Et quand je hanterai pendant mes nuits d’effroi
Les tombeaux des martyrs qui gémiront sur moi,
Que les noirs Séraphins, les Princes des ténèbres
Me lancent sous le choc de leurs ailes funèbres,
Le souffle sulfureux des imprécations.
Que je meure sans l’huile et sans les onctions,
Et n’ayant point baisé la croix expiatoire,
Et que l’Enfer soit clos pour l’éternité noire
Sur mon âme et mon corps plongés soixante fois
Dans des fleuves ardents de bitume et de poix…
Ils viennent ! Les voici les Anges de l’abîme,
Car j’ai commis par toi l’irrémissible crime,
Ma fille. Ils m’ont saisie entre leurs bras velus.
Je meurs. Je suis damnée et comme n’étant plus…

Elle tombe inanimée.
L’ESCLAVE PHRYGIA.

Elle est inerte et froide et telle qu’une morte :
Réveille-toi, maîtresse ! O femmes, qu’on la porte
En sa litière. Hélas ! voyez-vous sa pâleur ?
Cette méchante enfant l’a tuée, ô douleur !

DAPHNÉ.

Qu’on apporte l’anneau, le voile et la couronne !
Jésus, prince jaloux, prends celle qu’on te donne.
Rends la vie et l’espoir, mère, à ton front pâli ;
Mère, rassure-toi, ton vœu sera rempli.

Les femmes esclaves ont emporté Kallista.