Page:Lemaître - Jean Racine, 1908.djvu/95

La bibliothèque libre.
Cette page n’a pas encore été corrigée

pitié que nous avons d’eux… Les beautés tragiques enlèvent l’âme, et se font sentir à tout le monde avec la soudaineté des éclairs.

Quand la lecture de Psyché est terminée :

Ne croyez-vous pas, dit Ariste, que ce qui vous a donné le plus de plaisir, ce sont les endroits où Polyphile a tâché d’exciter en vous la compassion ? — Ce que vous dites est fort vrai, repartit Acante (Racine) : mais je vous prie de considérer ce gris-de-lin, ce couleur aurore, cet orangé et surtout ce pourpre qui environnent le roi des astres… En effet, il y avait longtemps que le soir ne s’était trouvé si beau… On lui donna (à Acante) le loisir de considérer les dernières beautés du jour ; puis, la lune étant en son plein, nos voyageurs et le cocher qui les conduisait la voulurent bien pour leur guide.

Ainsi, La Fontaine nous montre dans Racine, vers 1663, un jeune homme extrêmement sensible, amoureux des spectacles de la nature plus que Boileau et Chapelle, autant que La Fontaine lui-même, — et amoureux de la tragédie.

Et, en effet, Racine, en ce temps-là, achevait d’écrire la Thébaïde ou les Frères ennemis. Pourquoi ce sujet et non un autre ? Je n’en sais rien. Il avait vingt-trois ans ; il voulait faire une tragédie ; on lui avait conseillé ce sujet-là ; il l’avait accepté. Il dira dans une préface des Frères ennemis écrite pour l’édition collective de 1676 :

Le lecteur me permettra de lui demander un peu plus d’indulgence pour cette pièce que pour les autres