Aller au contenu

Page:Lemerre - Anthologie des poètes français du XIXème siècle, t4, 1888.djvu/203

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
183
JEANNE LOISEAU.


Partez pour l’enchanter, fruits d’un hymen sublime.
Votre naissance est haute, et pure, et légitime :
               Qu’il soit donc fier de vous !
Vous êtes siens. Sans lui, vous dormiriez encore,
Germes obscurs marqués pour ne jamais éclore,
               Dans le néant jaloux.

Souvent je sens en moi son esprit qui s’éveille...
Alors il faut écrire, et prolonger la veille,
               Et vous naissez, mes vers.
J’aime ce doux travail qui me tient accoudée :
Enfermer en tremblant l’essor de son idée
               Dans mes rythmes divers.

Et s’il la reconnaît, pour peu qu’il lui sourie,
Si, puissante, elle vit sous la strophe fleurie,
               Quel triomphe charmant !
Lorsque aussi pleinement deux êtres se possèdent,
Il n’est point sous le ciel de bonheurs qui ne cèdent
               À leur enivrement.

Laissez-moi vous bénir, douces rimes fidèles,
Puisque vos sons, légers comme un battement d’ailes,
               Quelquefois l’ont charmé.
Laissez-moi vous bénir, ô mes vers, frais calices !
Puisque mon bien-aimé respire avec délices
               Votre souffle embaumé.


(Un Mystérieux Amour)