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HISTOIRE DE LA COMMUNE DE 1871



inondée. Comme Crémieux, Etienne Pélissier, Roux furent condamnés à mort. Ce n’était pas assez pour la réaction jésuitico-bourgeoise. Espivent fit déclarer par la cour de cassation que les Bouches-du-Rhône étaient en état de siège depuis le 9 août 70, en vertu d’un décret de l’impératrice-régente, lequel n’avait été ni publié au Bulletin des lois, ni sanctionné par le Sénat, ni promulgué. Muni de cette arme, il poursuivit tous ceux que marqua le doigt de la congrégation et qui s’étaient montrés contre l’Empire. Le conseiller municipal David Bosc, ex-délégué à la commission, armateur plusieurs fois millionnaire, accusé d’avoir volé à un agent de police une montre en argent, ne fut acquitté qu’à la majorité de faveur. Le lendemain, le colonel-président fut remplacé par le lieutenant-colonel du 4e chasseurs Donnat, à moitié fou d’absinthe. Un ouvrier âgé de soixante-quinze ans fut condamné à dix ans de travaux forcés et à vingt ans d’interdiction de ses droits civils et politiques, pour avoir, le 4 Septembre, arrêté une demi-heure l’agent de police qui l’avait envoyé à Cayenne en 52. Une vieille folle, pourvoyeuse des jésuites, arrêtée un moment au 4 Septembre, accusa de son arrestation l’ancien commandant des civiques. Son accusation était contredite par elle-même, battue en brèche par des alibis et des preuves sans nombre. L’ex-commandant fut condamné à cinq ans de prison et dix années d’interdiction. Un des juges-soldats sortant de commettre son crime disait : « Il faut avoir de bien profondes convictions politiques pour condamner dans de pareilles affaires. » Avec de tels collaborateurs, Espivent put satisfaire toutes ses haines. Il demanda au parquet de Versailles de lui céder le membre de la Commune Amouroux, délégué un moment à Marseille. « Je le poursuis, écrivit Espivent, pour embauchage, crime puni de la peine de mort et je suis persuadé que cette peine lui sera appliquée. »

Le conseil de guerre de Lyon ne fut pas trop au-dessous. Il poursuivit quarante-quatre personnes pour l’affaire du 22 Mars et il en condamna trente-deux à des peines variant de la déportation à la prison. L’insurrection du 30 Avril fournit soixante-dix accusés pris au hasard à Lyon comme on faisait à Versailles. Le