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Page:Lucain, Silius Italicus, Claudien - Œuvres complètes, Nisard.djvu/53

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LA PHARSALE.


ses rochers les flots Tyrrhéniens, et Ancône, tourmentée par les vagues dalmatiques. Dans ses vastes réservoirs, la montagne contient des fleuves immenses qu’elle envoie diviser les ondes de la double mer.

De son flanc gauche se précipite le rapide Métaurus, et le Crustume ravageur, et le Sapis joint à l’Isaurus, et la Senna, et l’Autidus qui fend les vagues de l’Adriatique, et celui de tous les fleuves que la terre vomit d’une plus large bouche, l’Éridan qui roule dans la mer les forêts abattues, l’Eridan[1] qui épuise toutes les eaux de l’Hespérie. Suivant la fable, le premier des fleuves, il ombragea ses rives d’une couronne de peupliers. Lorsque Pliaétun, égarant le char du soleil dans une roule oblique, enflamma l’air de ses rênes brûlantes, les sources de la terre embrasées se taiirent, et les flots de l’Eridan résistèrent aux feux dévorants de Phébus. Il égalerait le Nil, si le Nil ne promenait pas les sables dormants de la Libye sur la vallée profonde de l’Égypte. Il égalerait l’ilisler, si, dans sa course à travers le monde, rilisler ne se grossissait des torrents qui cherchent où verser leurs ondes, et dont il entraîne la foule dans la mer Scythique.

Les eaux qui arrosent le flanc droit de la montagne forment le Tibre et le Rutube profond. De là découlent l’impétueux Vulturne et le Sarnus, qui exhale la brume des soirs, et le Liris, que les sources vestines poussent dans les forêts de Marica, et le Siler qui borde les champs de Salerne, et le Macra qui ne pourrait porter une nacelle, et roule sur des écueils jusqu’au port voisin de Luna.

Où se dresse le plus haut dans les airs la longue croupe de l’Apennin, h ; mont voit à ses pieds la Gaule et touche le versant des Alpes. Il donne des fruits au Marse, à l’Ombrien : la charrue sabellienne le sillonne ; de ses roches chargées de pins il embrasse toutes les peuplades indigènes du Latium, et ne ferme qu’aux antres de Scylla la ceinture de ses collines, qui s’étend jusqu’au sanctuaire de Junon Lacinienne. Il dépassait cette limite : mais l’Océan, pesant sur l’Italie, l’a rompue ; les flots ont repoussé les terres ; les deux mers ont brisé le détroit, et lePélore, dernière colline de l’Apennin, est resté à la Sicile.

César, plein de la fureur des armes, n’aime que les chemins arrosés de sang. Il se plaint de trouver les frontières vides d’ennemis, et d’envahir des plaines désertes. Il lui faut des obstacles qui l’écartent de sa roule ; il lui faut des guerres enchaînées à des guerres. On lui ouvre les portes, il voudrait les rompre ; le laboureur le laisse fouler ses campagnes, il voudrait les ravager par le fer et le feu. Il a honte de marcher dans une voie qu’on lui cède, et de paraître encore citoyen.

Chancelantes, incertaines entre les deux partis, les villes du Latium se livreront elles-mêmes à la première alarme de la guerre qui approche.

  1. Le Pô.