Page:Malebranche - De la recherche de la vérité.djvu/575

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rapports de grandeur et à des rapports de qualité ; en appelant rapports de grandeur tous ceux qui sont entre les choses considérées comme capables du plus et du moins, et rapports de qualité tous les autres. Ainsi, l’on peut dire que toutes les questions tendent à découvrir quelques rapports, soit de grandeur, soit de qualité.

La-première et la principale de toutes les règles est qu’il faut connaître très-distinctement l’état de la question qu’on se propose de résoudre, et avoir des idées de ses termes assez distinctes, pour les pouvoir comparer, et pour-en reconnaître ainsi les rapports inconnus.

Il faut donc premièrement apercevoir très-clairement le rapport inconnu que l’on y cherche, car il est évident que si l’on n’avait point de marque certaine pour reconnaître ce rapport inconnu lorsqu’on le cherchait, ou lorsqu’on l’aurait trouvé, ce serait en vain qu’on le chercherait.

Secondement, il faut autant qu’on le peut se rendre distinctes les idées qui répondent aux termes de la question, en ôtant l’équivoque des termes, et claires, en les considérant avec toute l’attention possible. Car si ces idées sont si confuses et si obscures, qu’on ne puisse faire les comparaisons nécessaires pour découvrir les rapports que l’on cherche, l’on n’est point encore en état de résoudre la question.

En troisième lieu, il faut considérer avec toute l’attention possible les conditions exprimées dans une question, s’il y en a quelques-unes, parce que sans cela l’on n’entend que confusément l’état de cette question, outre que les conditions marquent ordinairement la voie pour la résoudre. De sorte que lorsqu’on a une fois bien conçu l’état d’une question et ses conditions, on sait et ce qu’on cherche, et quelquefois même par où il s’y faut prendre pour le découvrir.

Il est vrai qu’il n’y a pas toujours quelques conditions exprimées dans les questions ; mais c’est que ces questions sont indéterminées. et que l’on peut les résoudre en plusieurs manières, comme si un demandait un nombre carré, un triangle, etc, sans rien spécifier davantage ; ou bien c’est que celui qui les propose ne sait point les moyens de les résoudre, ou qu’il les cache à dessein d’embarrasser ; comme si on demandait que l’on trouvât deux moyennes proportionnelles entre deux lignes, sans ajouter par l’intersection du cercle et de la parabole, ou du cercle et de l’ellipse, etc.

Il est donc absolument nécessaire que la marque par laquelle on connaît ce qu’on cherche soit fort distincte, qu’elle ne soit point