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Page:Manuel d’Épictète, trad. Guyau, 1875.djvu/144

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EXTRAITS DES ENTRETIENS D’ÉPICTÈTE.

route ! Eh bien ! les hommes ont élevé des temples et des autels à Triptolème, parce qu’il leur a donné une nourriture plus douce ; et celui qui a trouvé, mis en lumière, et produit devant tous les hommes la vérité, non pas sur les moyens de vivre, mais sur les moyens de vivre heureux, est-il quelqu’un de vous qui lui ait construit un autel ou un temple, qui lui ait élevé une statue ou qui remercie Dieu à cause de lui ? Quoi ! pour le don de la vigne ou du froment, nous offrons des sacrifices de reconnaissance ; et, quand on a déposé dans notre intelligence un fruit d’où devait sortir la démonstration de la vérité au sujet du bonheur, nous n’en rendrons aucune action de grâces à Dieu !

VII

Contre les sceptiques.

Si quelqu’un résiste à l’évidence complète, il n’est pas facile de trouver des raisons capables de le faire changer d’avis. Et ceci ne tient ni à sa force, ni à la faiblesse du démonstrateur ; mais quand, mis au pied du mur, il reste là comme une pierre, comment discuter avec lui ?

Cette pétrification est de deux sortes : il y a celle de l’intelligence ; il y a celle du sens moral, quand, de parti pris, on refuse de se rendre à l’évidence, ou de renoncer à des contradictions. Or, pour la plupart, nous avons grand’peur de la mort du corps, et nous faisons tout pour ne pas y arriver ; mais la mort de l’âme, nous nous en inquiétons peu. Quand la conscience et le sens moral sont morts chez quelqu’un, nous appelons encore cela de la puissance d’esprit !

VIII

On court à Olympie contempler les jeux, et on oublie de se contempler et de se connaître soi-même.

Vous courez à Olympie pour voir l’œuvre de Phidias, et chacun de vous regarderait comme un malheur de mourir