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Page:Manuel d’Épictète, trad. Guyau, 1875.djvu/21

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XI
SUR LA PHILOSOPHIE D'ÉPICTÈTE.

Se porter avec trop de véhémence vers les choses, vouloir avec excès ou repousser avec trop de répugnance tel ou tel événement, autant de fautes qui, selon les stoïciens, proviennent d’une même erreur : nous avons une fausse idée de notre puissance ; nous espérons pouvoir changer, bouleverser la nature, la conformer à nos vouloirs[1]. C’est impossible. Nous pouvons tout en nous, rien au dehors. L’homme possède ce qu’il y a de meilleur dans la nature entière, la faculté d’user bien ou mal des représentations (ἡ χρηστικὴ δύναμις ταῖς φαντασίαις)[2] ; mais le pouvoir de façonner les choses mêmes et de détourner les événements ne nous appartient pas. En nous attribuant ce pouvoir et en croyant par là nous élever, nous nous rabaissons réellement nous-mêmes. Restons libres au dedans de nous, et laissons la nécessité gouverner le monde. Ou plutôt, faisons mieux encore : consentons librement à ce qui est nécessaire, et par là changeons pour nous en liberté cette nécessité même des choses.

Les préceptes du stoïcisme que nous avons exposés jusqu’ici peuvent se ramener à un seul :

  1. Manuel, viii.
  2. Entretiens, I, i ; II, viii.