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LA CIVILISATION ET LE GRANDS FLEUVES

millions d’hommes sont menacés de mort par inanition. Les disettes sont à craindre, surtout dans le Sindh et le Pandjab, dans le bassin gangétique et sur les côtes orientales, c’est-à-dire partout où la pluie moyenne est de 1 mètre à 1 m. 50 ; ces contrées se dépeupleraient périodiquement si les canaux d’irrigation ne permettaient de suppléer aux pluies. L’utilisation complète des eaux courantes, naissant pour la plupart en des régions où les pluies tombent en abondance, est le seul moyen d’assurer la réussite des récoltes, et, par conséquent, l’existence des cultivateurs dans le Sindh et toute la région du versant oriental de l’Inde…. Qu’une rivière se dessèche ou se déplace, les populations sont condamnées à périr, bien plus sûrement que si une armée de massacreurs avait envahi le pays[1]. »

À cette nécessité permanente de suppléer à l’insuffisance des pluies par des travaux trop importants pour être entrepris par des familles ou des communautés isolées, se rattache un second élément avec lequel nous avons aussi fait connaissance dans les autres grands bassins historiques : le remaniement perpétuel du sol par le caprice des eaux. « Une grève de cailloux cédant sur un point ou sur un autre, un tronc d’arbre qu’emporte le courant, suffisent pour que le lit se déplace ; le cours d’eau prend une direction nouvelle, et parfois vers un autre bassin… Les rivières qui descendent de l’avant-chaîne

  1. Élisée Reclus, ouv. cité, t. VIII ; cf. aussi Rob. B. Buckley, Irrigation works India.