Page:Meillet - Esquisse d'une grammaire comparée de l'arménien classique (1936).djvu/113

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mnaçi մնացի, keçi կեցի (de *keaçi). — Les dénominatifs comme yusam յուսամ « j’espère », dérivé de yoys յոյս « espérance » répondent au type de skr. pr̥tanāyáti « il combat », gr. τιμάω (timaô) lat. anerō, v. sl. kotorajõ « je combats » etc., et leur -a- –ա– peut être issu de *-â-ye.

β) Présent à nasale.

En indo-européen, il n’existait et ne pouvait exister de présents en *-nā- que dans les racines dissyllabiques terminées par une voyelle longue alternant avec  ; c’est ainsi qu’on a skr. pr̥ṇāti « il emplit » et dorien δάμνᾱμι (damnāmi). Il a été tiré de là un suffixe -nā- en sanskrit, et le suffixe -na- –նա– de l’arménien reconnaît pareille origine. Ce suffixe a la forme -na- –նա– dans deux cas isolés où l’aoriste est primaire : baṙnam բառնամ « j’enlève », de *barjnam (*բարձնամ), aor. barji բարձի et daṙnam դառնամ « je tourne », de *darjnam (*գարձնամ), aor. darjay դարձայ. Partout ailleurs -na- suit un -a-, ainsi dans stanam ստանամ « je me procure, j’achète », aor. staçay ստացայ, cf. lat. (de-, prae-)stināre ; uranam ուրանամ « je nie », cf. gr. ἀρνέομαι (arneomai) (B. S. L. XXVI, p. 19) ; banam բանամ « j’ouvre », aor. baçi բացի, etc. ou encore loganam լոգանամ « je me baigne », cf. gr. λούω (louô) ou luanam լուանամ « je lave », cf. gr. πλύνω (plunô). Le suffixe -ana- անա sert à former un nombre illimité de présents exprimant que le sujet devient telle ou telle chose, ainsi k‘ahanayanam քահանայանամ « je deviens prêtre », de k‘ahanay քահանայ « prêtre » ; tkaranam տկարանամ « je deviens faible », de tkar տկար « faible », etc. Le -e- –ե– des présents tels que arbenam արբենամ « je m’enivre » représente *ea devenu e ե en syllabe intérieure.

d.) Type en -u- –ու–.
α) Présent, sans nasale.

81. — Le présent gelum գելում « je tourne » (aor. geli գելի) rappelle gr. Ϝελύ-σθη (Welu-sthê) « il s’est tourné », lat. uoluō, gr. εἰλύομαι (eiluomai), got. walwjan « rouler » et peut s’expliquer par un thème *welu-, fléchi sans voyelle thématique, ou par ce même thème avec suffixe secondaire *-ye- soit *welu-ye-. On est par là conduit à expliquer d’une manière analogue les autres présents en -u- –ու– d’aspect primaire : henum հենում « je couds, je tisse » (aor. heni հենի) est