Aller au contenu

Page:Montesquieu - Œuvres complètes, éd. Laboulaye, t3.djvu/247

La bibliothèque libre.
Cette page n’a pas encore été corrigée
155
LIVRE IV, CHAP. VI.


objet, comme l’autre a eu la guerre, ils se ressemblent dans la voie singulière où ils ont mis leur peuple, dans l’ascendant qu’ils ont eu sur des hommes libres, dans les préjugés qu’ils ont vaincus, dans les passions qu’ils ont soumises.

Le Paraguay peut nous fournir un autre exemple. On a voulu en faire un crime à la Société [1] qui regarde le plaisir de commander comme le seul bien de la vie ; mais il sera toujours beau de gouverner les hommes en les rendant plus heureux [2].

Il est glorieux pour elle d’avoir été la première qui ait montré dans ces contrées l’idée de la religion jointe à celle de l’humanité. En réparant les dévastations des Espagnols, elle a commencé à guérir une des grandes plaies qu’ait encore reçues le genre humain [3].

Un sentiment exquis qu’a cette société [4] pour tout ce qu’elle appelle honneur, son zèle pour une religion qui humilie bien plus ceux qui l’écoutent que ceux qui la prêchent, lui ont fait entreprendre de grandes choses ; et elle y a réussi. Elle a retiré des bois des peuples dispersés ; elle leur a donné une subsistance assurée ; elle les a

  1. Les Jésuites.
  2. Les Indiens du Paraguay ne dépendent point d'un seigneur particulier, ne payent qu’un cinquième des tributs, et ont des armes à feu pour se défendre. (M.)
  3. Sans doute, rien n’est plus beau que de gouverner pour faire des heureux ; et c’est dans cette vue que l’auteur appelle l'ordre des Jésuites la Société par excellence. Cependant M. de Bougainville nous apprend que les Jésuites faisaient fouetter les pères de famille dans le Paraguay. Fait-on le bonheur des hommes en les traitant en esclaves et en enfants ? (VOLTAIRE.)
  4. Les mots : qu'a cette société, manquent dans A. B.