tention que demande le nécessaire pour sa famille et même le superflu pour sa patrie. Les richesses donnent une puissance dont un citoyen ne peut pas user pour lui ; car il ne seroit pas égal. Elles procurent des délices dont il ne doit pas jouir non plus parce qu’elles choqueroient
l’égalité tout de même
[1].
Aussi les bonnes démocraties, en établissant la frugalité domestique, ont-elles ouvert la porte aux dépenses publiques, comme on fit à Athènes et à Rome. Pour lors la magnificence et la profusion naissoient du fonds de la frugalité même : et, comme la religion demande qu’on ait les mains pures pour faire des offrandes aux dieux, les lois
vouloient des mœurs frugales pour que l’on pût donner à sa patrie.
Le bon sens et le bonheur des particuliers consiste beaucoup dans la médiocrité de leurs talents et de leurs fortunes [2]. Une république où les lois auront formé beaucoup de gens médiocres, composée de gens sages, se gouvernera sagement ; composée de gens heureux, elle sera très-heureuse.