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��276 LA NOUVELLE REVUE FRANÇAISE

— Comme je puis.

— Mais dis-moi comment tu essayes ?

— Ecoute encore, puisque tu le désires... Je ne sais trop comment t'éclaircir ce qui n'est pas clair pour moi-même... O Phèdre, quand je compose une demeure (qu'elle soit pour les dieux, qu'elle soit pour un homme), et quand je cherche cette forme avec amour, m'étudiant à

féer un objet qui réjouisse le regard, qui s'entretienne avec l'esprit, qui s'accorde avec la raison et les nombreuses convenances,... je te dirai cette chose étrange qu'il me semble que mon corps est de la partie... Laisse-moi dire. Ce corps est un instrument admirable, dont je m'assure que les vivants, qui l'ont tous à leur service, n'usent pas dans sa plénitude. Ils n'en tirent que du plaisir, de la douleur, et des actes indispensables, comme de vivre. Tantôt ils se confondent avec lui ; tantôt, ils oublient quelque temps son existence ; et tantôt brutes, tantôt purs esprits, ils ignorent quelles liaisons universelles ils contiennent, et de quelle substance prodigieuse ils sont faits. Par elle, cepen- dant, ils participent de ce qu'ils voient et de ce qu'ils touchent : ils sont pierres, ils sont arbres ; ils échangent des contacts et des souffles avec la matière qui les englobe. Ils touchent, ils sont touchés ; ils pèsent et soulèvent des poids ; ils se meuvent, et transportent leurs vertus et leurs vices ; et quand ils tombent dans la rêverie, ou dans le sommeil indéfini, ils reproduisent la nature des eaux, ils se font sables et nuées... Dans d'autres occasions, ils accumu- lent et projettent la foudre !...

Mais leur âme ne sait pas exactement se servir de cette nature qui est si près d'elle, et qu'elle pénètre. Elle devance, elle retarde ; elle semble fuir l'instant même. Elle en reçoit des chocs et des impulsions qui la font s'éloigner en elle- même, et se perdre dans son vide où elle enfante des fumées. Mais moi, tout au contraire, instruit par mes erreurs, je dis en pleine lumière, je me répète à chaque aurore :

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