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440 LA NOUVELLE REVUE FRANÇAISE

tiers rouler la terre entière dans la fange du bourbier, afin de pouvoir seulement tremper le bout de son pinceau dans ce que j'appelle le plus beau des bruns et en colorer des histoires de fantômes, des contes spirites, bien plus puis- samment qu'avec la terre d'ombre et le bistre banals.

Pourtant, il me sem.ble qu'il y a une forme de sottise plus haïssable encore : c'est le sage de société, Salomon du salon, et dîneur-en-ville philosophe, le bel esprit qui se sert d'une doctrine comme d'un billot pour essayer dessus le tranchant de ses facultés et montrer combien d'opinions sensées il peut couper en morceaux durant l'instant cri- tique qui sépare la soupe du poisson. Ces gens-là furent mes protecteurs; et c'est à ces gens-là et à leurs pareils, dont le souvenir remonte en moi et me soulève le cœur, que j'aurais fait tort 1 De la reconnaissance à ces gens-là ? La reconnaissance, alors, d'une fille envers le gigolo et le maquereau, envers ses bons amis, depuis le loustic qui cherche des plaisanteries douteuses à répéter au cercle jus- qu'au décorateur de tabatières qui (l'honnête homme) se creusait inutilement la tête pour découvrir une Pasiphaé aussi « nature ». Tous et chacun la paient, lui font des cadeaux, la protègent de la police, — et comme elle les hait pour la peine ! Moi, de même. Et voilà pour le remords que j'ai de mon ingratitude envers un digne public !

Mais Dieu?... Oui, c'est une question grave. Eh bien ! Monsieur, puisque vous insistez.., (vraiment comme vous savez me forcer à tout dire 1 Je ne parle pas de vous, bien entendu, quand je dis « ces gens-là » : Moi vous haïr ! Mais cette miss Stokes, ce Juge !... Assez, merci... oui, du sucre... Merci, Monsieur).... Allons-y donc! Me croirez- vous, pourtant ? Vous avez entendu mes aveux, je ne m'en dédis pas d'un seul mot: j'ai trompé quand j'ai pu, j'ai imité des coups frappés en faisant craquer mes doigts de pieds, j'ai fait mouvoir de fausses mains, j'ai écrit, sans

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