Page:NRF 16.djvu/515

La bibliothèque libre.
Cette page n’a pas encore été corrigée

NOTES 509

certes point de qualité très rare, mais il avait le mérite d'exister, et au lieu d'être un ersat:^ du théâtre, de se présenter au titre photographique, sinon déjà cinégraphique.

Puis, tandis qu'en des salles closes Henri II, les Français s'obsti- naient à faire pérorer et gesticuler des mousquetaires muets, les Amé- ricains découvraient que le cinéma s'apparente d'assez près à la danse et instituaient LE MOUVEMENT, condition esscutielle de l'art nouveau.

Ce mouvement qui nous fait trouver passionnants, malgré la puérilité et la monotonie de leur livret, tous les films du Far West (Rio Jim, Tom Mix), est également à la base des bandes comiques yankees. La vie y est perpétuellement « à l'viccéléré ». L'homme qui marche, court, tombe, se relève, nous est présenté comme une sorte de mécanique à aspect humain, dont la transcription photographique ne fait qu'exagérer l'automatisme. Et ce sont les ineffables poursuites, les culbutes, les glissades sur parquets trop cirés, les déraillements, les accidents d'auto, toutes hilarantes petites choses, auxquelles Mac Scnnet ajouta le comique grivois des Baigneuses en maillot avec Harry Polar et Zigoto, et le comique, beaucoup plus intéressant, des animaux avec Louise Fazenda dite Philomène. Bien que les interprètes de cette trépidante commedia del arte cinégraphique soient exactement d'accord avec M. Bergson qui définit le comique : « du mécanique plaqué sur du vivant », il est évident que ces primitifs n'ont fait qu'indiquer la bonne voie. Mais ne fallait-il pas étudier longuement les gammes, avant de se lancer dans l'exécution des morceaux difiîciles ?

Trois comédiens sont allés plus avant : Thomas Arbucklc (« Fatty »), Harold Lloyd (« Lui ») et Charlic Chaplin (« Chariot »).

Et plus loin :

Le cinéma doit chercher la création de types comiques, fortement accentués, dans la voie génialement ouverte par Chaplin.

L'optique cinégraphique est tout à fait différente de l'optique théâ- trale ; force sera au scénariste, privé du dialogue qui nuance les carac- tères, de placer le comique continuellement dans l'action et dans les plans successifs du personnage par rapport à l'action.

Ce renforcement de l'action ne suffira pas. Pour démonter logique- ment le mécanisme mental du ou des personnages, le procédé des images mentales devra intervenir. Ainsi l'ont compris Louis Delluc (Eumèe noire et Le Silence) et Léon Poirier (Le Penseur), mais leurs images mentales étaient encore embryonnaires. Le cinéma devra d'une part différencier par un procédé spécial les images mentales des images du réel, et d'autre part reconstituer à l'aide d'une succession visuelle le mouvement psychologique lui-même.

�� �