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NOTES 62^

était montrée, jaillissant soudain, comme une affreuse fleur implicite, d'un amour simplement devenu trop fort, trop expansif, la lutte du héros avec son doute, la constatation de l'invincible dilemne : Ou lui, ou moi (a Ou le doute me tuera, ou je le tuerai », disait à peu près Bruno), l'extrême logique avec laquelle le malheureux suivait son aberration, l'alternance, si curieusement rythmée, en lui, du soupçon et de la foi, de la crainte et de la paix, la fatalité avec laquelle pourtant au bout du compte reparaissaient toujours l'incertitude, et l'atroce besoin de la calmer aux dépens même de son bonheur, — toute cette étude semblait être, pouvait être de quelqu'un qui percevait les passions et était capable de les peindre. Elle pouvait être aussi, malheureusement, à la rigueur, d'un simple entrepre- neur d'étrangeté ; la déduction qu'on nous proposait pouvait avoir été conçue dans l'abstrait, pour notre étonnement plutôt que pour notre instruction ; elle pouvait découler de prémisses entièrement artificielles, au lieu de traduire une suite positive de sentiments. Il pouvaity avoir eu, entre un esprit compliqué, retors, mais se mouvant dans le vide, d'une part, et la réalité psychologique, de l'autre, une interférence tout à fait acciden- telle, essentiellement passagère. Le 111'= acte, si résolument invraisemblable, si surchargé d'absurde pittoresque, et qui rendait rétrospectivement attentif à certaines bizarreries désa- gréables des deux premiers, n'était pas fait pour décourager complètement cette hypothèse.

Les Amants puérils la fortifieraient, hélas ! gravement, si l'on ne m'assurait qu'ils ont été écrits antérieurement au Cocu. Je veux croire à cette chronologie ; je ne veux pas laisser si vite tomber en moi l'espoir d'un véritable talent psychologique. Et tout en comprenant l'opinion de ceux qui, d'après les seuls Amants Puérils, pronostiquent un nouveau Bataille, je veux me rappeler les scènes du Cocu qui semblent nous promettre un tout autre astre au ciel de notre dramaturgie.

JACQUES RIVIÈRE

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��LA PAIX, pièce en quatre actes, par Marie Lenéru (Odéon).

Au moment où Marie Lenéru est morte, on mourait tant et

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