Page:Neulliès - Tante Gertrude, 1919.djvu/19

La bibliothèque libre.
Cette page a été validée par deux contributeurs.
17
TANTE GERTRUDE

— Mademoiselle, c’est le notaire qui est là. Il demande à parler à mademoiselle.

— Bon on y va ! Il vient bien sûr me déranger encore pour la centième fois au moins au sujet de ce maudit testament. Attends-moi là, Paulette, je vais l’expédier tout de suite et je reviens.

— Oui, oui, allez ma tante, je ne suis pas pressée. M. de Lanchères doit me prendre ici avec sa voiture, vers cinq heures, et il est à peine quatre heures.

Mme Wanel, restée seule, reprit sa pose nonchalante. Étendue plutôt qu’assise sur le banc confortable au dossier renversé, elle s’éventait doucement, tout en songeant à ce que venait de lui dire sa tante, et les événements qui s’étaient succédé dans sa vie depuis deux ans se représentaient soudain à son esprit.

À la suite de son mariage, dont la cérémonie s’était terminée de façon si tragique, Paule, devenue veuve, avait hérité de toute la fortune de son mari. Elle avait alors joui pleinement de ces richesses pour lesquelles elle avait tout sacrifié ! Elle avait pu s’entourer de ce luxe qui lui était si cher ; et son deuil passé, elle se jeta à corps perdu dans toutes les distractions mondaines. Elle dépensa largement et sans compter ; aussi bientôt n’avait-il été bruit dans tout le département que des fêtes princières données par la belle Mme Wanel. Quelques familles de la haute société, lui tenant rancune de son mariage, s’étaient abstenues d’y paraître, et plus d’un salon où Mlle de Neufmoulins avait été reçue autrefois était resté fermé pour Mme Wanel. La jeune femme avait-elle était blessée de ces procédés ? Son orgueil en avait-il souffert ? Personne n’eût pu le dire. Éblouissante de beauté et d’élégance, toujours entourée d’un cortège d’admirateurs et de soupirants, un sourire gracieux sur sa bouche au dessin si pur, à l’expression si tendre, un regard ravi dans ses grands yeux candides comme ceux d’un enfant, Paulette allait de plaisirs en plaisirs, de fêtes en fêtes, indifférente à l’opinion de tous, n’ayant qu’une pensée : briller et s’amuser !

Son étonnement, en apprenant les clauses du