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moins grand que Rolant qui combattait pour sa patrie ; mais il en a la bravoure et le dévouement, sans en avoir la rudesse. Aimant Mirabel, il attend qu’elle soit chrétienne pour l’épouser ; ayant juré à Makaire de ne point le dénoncer en passant au travers du camp du roi, sous les murs de Lausanne, il reste fidèle à ce serment prêté à son ennemi mortel. Ces deux traits suffisent à peindre le caractère de notre héros ; c’est celui du chevalier du moyen-âge dans toute sa foi et sa loyauté.

Mirabel[1] est aussi une figure agréable et bien dessinée par l’auteur. Son type est fréquent dans les chansons de geste : elle rappelle particulièrement Floripas dans le Fierabras. Mais Mirabel est de beaucoup plus sympathique que la fille de Balant ; son amour pour Aiol n’est pas une passion brutale comme celui de cette dernière pour Gui de Bourgogne ; enfin elle a un beau et noble mouvement quand, refusant par deux fois d’abjurer la religion chrétienne, elle renverse la statue de Mahomet.

Passons sur les deux personnages de Makaire et d’Élie, qui n’offrent rien de très-particulier ; l’un est le type bien connu du traître des chansons de geste, des Alori, des Hardré et autres scélérats ; l’autre, un peu effacé dans le poëme d’Aiol, représente le noble chevalier injustement déchu de la faveur du roi et portant vaillamment son infortune. Le type du roi Louis, tel que nous le trouvons dans notre chanson, est plus intéressant. En effet,

  1. Le nom de Mirabel semble avoir été commun aux deux sexes au moyen-âge. Alberic de Trois-Fontaines (Pertz, Mon. Germ., XXIII, 894) parle d’un chef de Sarrasins en Sicile qui portait ce nom. Philippe Mousket donne à ce même chef le nom de Mirabeau (éd. Reiffenberg, v. 23339).