Page:Ovide - Œuvres complètes, trad Nisard, 1838.djvu/588

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Tu ajoutes l'imposture à ta faute, s'écrie Phébus, et tu oses essayer de mentir au dieu qui rend les oracles! Tant que la figue, achevant de condenser les sucs dont elle est gonflée, restera fixée sur l'arbre qui la nourrit, tu ne pourras te désaltérer aux eaux fraîches d'aucune fontaine." [2, 265] Il dit, et, monuments éternels de cet antique événement, on voit briller au même point du ciel, le Corbeau, la Coupe et le Serpent.

La troisième aurore qui se lève après les Ides voit les Luperques courant tout nus, et célébrant la fête du dieu qui porte deux cornes. Muses, dites-nous l'origine de ces solennités [2, 270] et de quelles contrées elles furent transportées dans notre Latium.

Les antiques populations de l'Arcadie adoraient Pan, dieu des troupeaux; à chaque pas, dans leurs montagnes, on retrouvait ses autels. Témoin le Pholoé, [2, 275] témoin la cime du Nonacris, couronnée de pins sauvages, le haut Cyllène, et les neiges des sommets parrhasiens; témoin l'eau du Stymphale et le Ladon, qui roule à la mer ses flots impétueux. Chaque jour, il recevait des offrandes comme protecteur des troupeaux, comme dieu des cavales, comme gardien des brebis. Évandre apporte avec lui le culte de cette divinité rustique. [2, 280] Il n'existait alors de Rome que l'emplacement de Rome même. Pan, depuis ce jour, est aussi un dieu pour nous, et le flamine Diale célèbre encore sa fête d'après les rites anciens, tels que nous les ont transmis les Pélasges.

Mais pourquoi cet usage de courir, et pourquoi ne courent-ils qu'après avoir dépouillé tout vêtement?

[2, 285] C'est que le dieu se plaît à errer d'un pas rapide au sommet des montagnes escarpées, et à jeter l'alarme parmi les bêtes sauvages. Nu lui-même, il veut que ses ministres le soient: les vêtements embarrassent celui qui veut courir.

Suivant les traditions, les Arcadiens habitaient la terre avant la naissance de Jupiter; [2, 290] c'était une race plus vieille que la lune. Leur vie était celle des brutes, étrangères à toute culture; multitude grossière et ignorante, qui habitait sous la feuillée, paissait l'herbe des champs, et ne connaissait d'autre boisson que l'eau puisée à deux mains dans les torrents. [2, 295] Aucun taureau ne gémissait à traîner le soc acéré de la charrue; aucun laboureur ne dictait des lois à la terre; on ignorait l'usage du cheval, chacun se portait lui-même; la brebis marchait revêtue de sa toison; les hommes vivaient sous le ciel, nus, [2, 300] habitués à supporter la pluie et les injures de l'air. Maintenant donc, la nudité des Luperques, souvenir des moeurs de nos aïeux, nous donne aussi une idée de leur riche indigence.

Mais pourquoi Faunus, surtout, repousse-t-il tout vêtement? C'est ce que nous apprend une tradition où respire la gaieté antique. [2, 305] Un jour le jeune héros de Tirynthe accompagnait le pas de la reine sa maîtresse; Faunus les aperçut du haut d'une colline, et embrasé aussitôt