Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
456
PENSÉES DE MARC-AURÈLE.
ne vient pas d’une communauté de sang et de race, mais d’une communauté d’intelligence[1]. C’est que tu ne penses pas non plus que l’intelligence en chacun de nous est Dieu[2], de qui nous sommes tous sortis ; que rien n’appartient en propre[3] à quelque être que ce soit, et que c’est de Dieu que nous viennent[4], et notre enfant, et notre corps, et notre âme ; que les choses ne sont que ce que les font nos idées[5] ; et enfin que chacun de nous ne vit absolument que dans le moment présent, et que c’est ce présent seul que nous pouvons perdre[6].
- ↑ D’une communauté d’intelligence. Voilà l’unité véritable de l’espèce humaine, qui diffère évidemment à tant d’autres égards. Le Stoïcisme a compris cette identité essentielle, grâce à la haute estime qu’il faisait de l’âme de l’homme ; et c’est par une erreur contraire que la science de notre temps a voulu identifier l’homme au reste des animaux, dont quelques-uns seraient ses ancêtres.
- ↑ Est Dieu. L’expression est forte ; mais, dans la mesure où elle est prise ici, elle est profondément vraie ; et il serait bien incompréhensible que Dieu, qui est partout, ne fut pas dans son plus bel ouvrage, l’âme de l’homme.
- ↑ Rien n’appartient en propre. C’est ainsi que saint Paul a dit : « Qu’avez-vous qui ne vous ait été donné ? » Ire aux Corinthiens, IV, 7.
- ↑ C’est de Dieu que nous viennent… C’est le développement naturel de la doctrine stoïcienne, qui voit dans le monde un ordre admirable, auquel n’échappent même pas les moindres détails, à plus forte raison les rapports des créatures humaines entre elles, et les créatures humaines elles-mêmes.
- ↑ Les choses ne sont que ce que les font nos idées. Voir un peu plus haut, §§ 22 et 25.
- ↑ C’est ce présent seul que nous pouvons perdre. Voir plus haut, la même pensée, liv. II, § 14.
liv. VII, § 1.