Page:Réchetnikov - Ceux de Podlipnaïa, trad Neyroud, 1888.djvu/54

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stanovoï. On ne me prendra pas ma vache, ma jolie vache ! Je ne crains personne !

Pila se sentait courageux à la pensée qu’il allait être haleur : il éprouvait une sensation inconnue de liberté, d’indépendance.

— Il mit quatre jours à arriver à Podlipnaïa, car il couchait dans tous les villages qui se trouvaient sur sa route. Il rêva plus d’une fois, pendant son sommeil, à ce halage qui l’occupait tant. Il se voyait aller avec Syssoïko, Aproska, et tous les Podlipovtsiens. Dans son rêve, il se fâcha tout rouge : pourquoi ces gens venaient-ils à sa suite ? Pourquoi Matriona l’accompagnait-elle ? Il ne les avait pas priés… ils n’avaient qu’à filer… Il lui sembla qu’ils avaient déjà marché toute la journée dans la montagne sans voir ni village ni hameau. Tout à coup, un paysan glissa et dégringola en bas d’un rocher ; après lui un autre, puis un autre, puis tous les paysans. Pila, tout épeuré, cria, et… se réveilla. Quand il vit qu’il n’était pas encore arrivé chez lui, il essaya de se rendormir pour avoir un songe plus agréable. Cette fois, il eut un autre rêve : ils coupaient et coupaient des arbres, bien qu’il n’y eût point de forêt devant eux. Syssoïko et Aproska disparurent tout à coup. Il les chercha partout sans les trouver ; enfin, il arriva dans le marais du hameau, et les vit à terre, morts. Un ours les a rongés, il a pleuré et hurlé. Il se réveilla de nouveau, les