Page:Régamey - Un assassin politique, 1894.pdf/7

La bibliothèque libre.
Cette page a été validée par deux contributeurs.
265
MÉLANGES.

séance est restée pour moi un des plus joyeux souvenirs de la campagne.

L’entrevue avec M. Cogordan, dans son cabinet du quai d’Orsay, a un tout autre caractère.

Hong Tjyong-ou, en abordant notre ministre, reconnaît en lui l’homme qu’il a vu arriver à la cour de son roi à Séoul, pour signer le premier traité conclu entre la France et la Corée. Cette signature avait donné lieu à une cérémonie à laquelle il assistait en qualité de secrétaire et, sous mes yeux, je le vois se jeter aux pieds de M. Cogordan et lui baiser les mains, avec une émotion non feinte. Un instant il s’était cru sauvé.

Peu de temps après j’apprenais, de l’homme d’état, qui est aujourd’hui notre ministre des affaires étrangères, que pour des raisons de hautes convenances politiques, la France devait ignorer complètement la Corée, les Coréens et tout ce qui les concernait.

Inutile, par conséquent, d’importuner davantage M. Cogordan. Hong Tjyong-ou n’a jamais compris pourquoi il n’a pas été admis une seconde fois en sa présence.

La « Réunion des Voyageurs » est composée de gens fort distingués, dînant ensemble de temps en temps, pour s’entretenir des choses qui les intéressent et donner un souvenir aux explorateurs dont les travaux et les découvertes honorent le pays.

Hong Tjyong-ou ne pouvait manquer de leur être présenté. Le 9 Mai 1891, au dessert, il paye son écot d’un petit discours en Coréen, dont voici la traduction :

« Je suis très touché de l’honneur qui m’est fait ce soir, grâce à mon ami Régamey, et plus heureux que je ne saurais dire. Il y a parmi vous de grands voyageurs, qui ont dû beaucoup observer et qui, par conséquent, doivent être de grands savants.

« Vous n’ignorez pas que la fondation de notre royaume remonte à plus de deux mille ans avant l’ère chrétienne. Ce fut le chaos