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Page:Régnier - L’Illusion héroïque de Tito Bassi, 1917.djvu/86

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situation véritable. Qu’étais-je donc au regard de ce personnage de fantaisie que je me substituais ainsi ? Un pauvre garçon, sans fortune et sans parents, qui ne subsistait que par la charité du bon abbé Clercati et par la hautaine protection du Comte et de la Comtesse. Qu’ils me la retirassent, qu’en serait-il de moi, avec pour toute ressource mon latin et les quelques connaissances que je devais à l’étude ? Mais ce n’était pas encore le précaire de ma destinée qui me causait le plus de chagrin. Ce n’était pas le souci de mon avenir matériel qui me tourmentait le plus vivement. Non, ce qui m’affligeait surtout, c’était la platitude et la médiocrité de ma vie. Serais-je donc condamné à cette terne et morne uniformité de tous mes jours, moi qui ne rêvais, dès l’enfance, que d’aventures héroïques et merveilleuses, ne fût-ce que pour y trouver l’occasion d’effacer en moi-même le mauvais souvenir de ce que j’appelais ma lâcheté et