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INSCRIPTIONS POUR LES TREIZE PORTES DE LA VILLE


POUR LA PORTE DES GUERRIERS


Porte haute ! ne crains point l’ombre, laisse ouvert
Ton battant d’airain dur et ton battant de fer.
On a jeté tes clefs au fond de la citerne.
Sois maudite à jamais si la peur te referme ;
Et coupe, comme au fil d’un double couperet,
Le poing de toute main qui te refermerait.
Car, sous ta voûte sombre où résonnaient leurs pas,
Des hommes ont passé qui ne reculent pas,
Et la Victoire prompte et haletante encor
Marchait au milieu d’eux, nue en ses ailes d’or,
Et les guidait du geste calme de son glaive ;
Et son ardent baiser en pourpre sur leur lèvre
Saignait, et les clairons aux roses de leurs bouches
Vibraient, rumeur de cuivre et d’abeilles farouches !
Ivre essaim de la guerre aux ruches des armures,
Allez cueillir la mort sur la fleur des chairs mûres,
Et si vous revenez vers la ville natale
Qu’on suive sur mon seuil au marbre de ses dalles,