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LES JEUX RUSTIQUES ET DIVINS


ODE III


Je t’ai connue,
Chère Ombre nue,
Avec tes cheveux lourds de soleil et d’or pâle,
Avec ta bouche de sourire et de chair douce.
Du plus loin de mes jours, là-bas, tu es venue
Au bout des vieux chemins de blés et de mousses,
Le long des prés, au bord du bois,
Alors que je suivais la sente et le ruisseau,
Joyeux du ruisseau clair et de la sente fraîche,
Et qu’à mes mains,
Entre mes doigts,
La fleur cueillie à l’herbe épaisse
Était toute moite de rosée
Et tremblante de l’or d’une abeille posée.
Au temps d’avril où les roseaux
Chantaient d’eux-mêmes,
Auprès des eaux et des fontaines,