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LES JEUX RUSTIQUES ET DIVINS


LA CLEF


Attends, pour t’en aller, souriante à ta vie,
Cueillir ses fleurs de chair et ses fruits d’or vivant
Et tresser les cyprès de sa mélancolie
Aux roseaux de sa joie en flûtes dans le vent,

Attends que le Destin, aussi vieux que la pierre
De l’antique demeure où ton sort a fleuri,
Remette entre tes mains la clef hospitalière
De la maison déserte et qui fut ton abri.

Et maintenant, va-t’en vers l’aurore éternelle
Avec l’Espoir et, côte à côte, avec l’Amour,
Et que chacun t’abrite à l’ombre de son aile
Et te mène le long des routes sans retour ;

Que l’un porte à jamais la palme toujours verte
Et la gourde noueuse au bout du bâton noir
Et que l’autre plus grave, entre ses mains offertes,
Tienne la grappe lourde et hausse le miroir.