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ARÉTHUSE

Éveille-toi et lève-toi !
Je ne peux plus vivre quand tu dors,
Ô toi qui dors toujours de m’être une inconnue !
Lève-toi nue
Avec tes grands cheveux croulant en algues d’or ;
Éveille-toi, ô toi qui dors,
Si tu restes si loin pourquoi es-tu venue
Un soir que je marchais sur cette grève ?
Et c’est en toi qu’il faut que le soleil se lève,
Ô toi que je ne connais pas,
Et tu seras !

Elle s’éveille.

La mer reflue et cet homme a cessé
Cette chanson à qui tu souriais en songe.
Il parlait d’arbres dont l’ombre grave s’allonge,
De grappes et d’abeilles…
Il a cessé
Cette chanson à l’aube et l’aurore est vermeille !
Lève-toi nue
Ô souriante, Âme inconnue !
Et que ta chair
Reste endormie, et viens là-bas,
Lève-toi de toi-même, enfin ! le ciel est clair,
Et viens là-bas
Loin de la grève aride et de la vaste mer.

Le soleil paraît.