Aller au contenu

Page:Régnier - Les Jeux rustiques et divins, 1897, 2e éd.djvu/68

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
64
LES JEUX RUSTIQUES ET DIVINS

Mêleront leur cascade d’or à l’eau d’argent,
Et ma poitrine, avec ses deux seins en avant,
Surgira de ma robe autour de moi tombée,
Et, debout, un instant, auprès de l’eau bordée
D’iris et de glaïeuls et de plantes flexibles,
Je me tiendrai pareille aux Nymphes invisibles
Qui hantent la forêt ou, Sirènes, la mer ;
Alors je descendrai, rose dans le flot clair
Avec sa grande ride en cercle autour de moi,
Et je te sentirai monter, ô cristal froid
Des sources, de mes jambes jusques à mon ventre
Et à mes seins et mes épaules, puis plus lente,
Rieuse et les yeux clos, je plongerai ma tête
Que tu verras parmi les herbes disparaître
Dans le remous ondé de mes grands cheveux d’or.
Dis, ne veux-tu pas que je sois celle qui sort
De l’eau, éblouie et, debout avec un rire,
Se dresse toute nue anxieuse et s’étire
Et qui s’endormirait fondue entre tes bras ?


Elle s’est retournée vers lui. Sa robe entr’ouverte la montre nue. De ses mains élevées elle soulève sa chevelure et apparaît un instant sur la forêt illuminée qu’assombrit un nuage subit.


LUI
Il va à elle les poings levés, menaçant. Elle se prosterne.


Je ne veux pas !