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Page:Régnier - Les Jeux rustiques et divins, 1897, 2e éd.djvu/93

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ARÉTHUSE


HEURE D’AUTOMNE


Mon jardin est là-bas derrière la colline
Et ma fontaine est douce où des roseaux s’inclinent
Sur l’eau bleue au matin et jaune vers le soir,
La bêche en le heurtant fait tinter l’arrosoir
Car la tâche finie on les rentre, et la bêche
Luit sur l’épaule comme une arme bonne et fraîche,
Et l’eau s’égoutte encor du crible de la pomme.
Mon songe tour à tour est la fleur qu’il se nomme
Tout bas, pour sa douceur ou pour son amertume ;
L’ombre vient ; l’herbe se fonce ; la terre est brune ;
Le sable de l’allée est blanc le long du buis ;
Le cep rompt sous la grappe, et l’arbre sous le fruit
Oscille, feuille à feuille, à son poids qui l’incline,
Car l’automne est déjà derrière la colline ;
Il vient, et avec lui bientôt il va falloir
La corbeille et la serpe au lieu de l’arrosoir,
Et vendanger la treille et cueillir l’espalier.
Et voir dans l’eau toutes les tiges s’effeuiller