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Page:Régnier - Les Rencontres de monsieur Bréot, 1904.djvu/158

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Je laissais la cadence interrompue et je courais, d’un trait, à l’hôtel de Grigny. Parfois la même folie me prenait quand j’étais occupé à seconder maître Pucelard, et il fallait tout le respect que je devais à mon maître pour m’empêcher de le planter là et de m’enfuir où je vous ai dit. Aussi par cette occupation maladive qui me tenait l’esprit, les progrès que je faisais dans mon art s’arrêtèrent-ils court. Monsieur Pucelard déplorait cette distraction où j’étais, sans en deviner les causes. Souvent il parlait amèrement de ces fausses dispositions à bien faire que l’on découvre chez les jeunes gens et qui ne sont qu’un espoir vain et trop prompt à se démentir. Mais, comme il était fort poli, il ne s’exprimait guère que par des détours dont je comprenais fort bien le sens et auxquels je ne répondais rien.

» Il suffisait de la vue de l’hôtel de Grigny pour dissiper toute ma honte et chasser tous mes regrets. Il m’apparaissait comme un lieu extraordinaire. J’éprouvais une sorte d’envie pour les gens que j’y voyais entrer et que j’en voyais sortir. Les uns et les autres me semblaient parés de je ne sais quoi qui les plaçait à part entre tous les mortels. La troupe de ces privilégiés était considérable, car monsieur le duc et madame la duchesse de Grigny