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Page:Régnier Double maîtresse 1900.djvu/328

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qu’il faillit tout d’abord la laisser tomber ; puis, avec précaution, il s’assit sur le rebord de son lit, la tenant entre ses genoux. Elle était fraîche et poussiéreuse ; des toiles d’araignées, soyeuses et légères, la rendaient comme molle et presque humide à toucher, M. de Galandot regarda lentement les dessins qui l’ornaient. Le potier y avait figuré une scène assez singulière. On y voyait un homme à longue barbe et au front chauve étendu à quatre pattes et, sur son dos, une femme nue à califourchon, comme sur une monture. D’une main elle le frappait d’un thyrse, et de l’autre elle levait à hauteur de sa bouche une grosse grappe de raisins.

M. de Galandot tenait maintenant l’amphore renversée et tâchait d’en faire glisser l’or que contenait son ventre rebondi ; mais les pièces introduites une à une par le goulot étroit en obstruaient l’ouverture de leur masse. M. de Galandot frappa la panse, du doigt. Elle rendit un son mat et métallique.

Tout à coup un sequin tomba, puis trois, puis deux, puis une pluie pressée qui s’éparpillait sur le lit. M. de Galandot prenait cet or à pleines mains et le fourrait fiévreusement dans ses poches. Celles de sa culotte furent vite pleines ; il en gonfla celles de ses basques et de son gilet ; il en noua dans un vaste mouchoir, fit un tas du reste et le cacha sous sa paillasse. Puis debout, il retourna une dernière fois l’amphore.

Un ducat demeuré au fond dégringola et se mit à rouler en cercle sur le dallage et finit par y