Page:Rabelais marty-laveaux 01.djvu/259

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mains, comme est l’usance des escholiers de ladicte université ; mais il n’y demoura gueres, quand il vit qu’ilz faisoyent brusler leurs regens tout vifz comme harans soretz, disant : « Jà Dieu ne plaise que ainsi je meure, car je suis de ma nature assez alteré sans me chauffer davantaige ! »

Puis vint à Montpellier où il trouva fort bon vins de Mirevaulx et joyeuse compagnie ; et se cuida mettre à estudier en medicine ; mais il considera que l’estat estoit fascheux par trop et melancholicque, et que les medicins sentoyent les clisteres comme vieulx diables. Pour tant vouloit estudier en loix ; mais, voyant que là n’estoient que troys teigneux et un pelé de legistes audict lieu, s’en partit. Et au chemin fist le Pont du Guard et l’amphitheatre de Nimes en moins de troys heures, qui toutesfoys semble œuvre plus divin que humain ; et vint en Avignon, où il ne fut troys jours qu’il ne devint amoureux : car les femmes y jouent voluntiers du serre cropyere, parce que c’est terre papale.

Ce que voyant, son pedagogue, nommé Epistemon, l’en tira et le mena à Valence au Daulphiné ; mais il vit qu’il n’y avoit grand exercice et que les marroufles de la ville batoyent les escholiers ; dont eut despit, et, un beau dimanche que tout le monde dansoit publiquement, un escholier se voulut mettre en dance, ce que ne permirent lesdictz marroufles. Quoy voyant, Pantagruel leur bailla à tous la chasse jusques au bort du Rosne, et les vouloit faire tous noyer ; mais ilz se musserent contre terre comme taulpes, bien demye lieue soubz le Rosne. Le pertuys encores y apparoist.

Après il s’en partit, et à troys pas et un sault vint à Angiers, où il se trouvoit fort bien, et y eust demeuré quelque espace, n’eust esté que la peste les en chassa.

Ainsi vint à Bourges, où estudia