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prologve

quelle heure, comment, & à quel propous luy eſtoit ce grand theſaur aduenu. Entendens que c’eſtoit par auoir perdu ſa coingnee, Hen, hen, dirent ilz, ne tenoit il qu’à la perte d’vne coingnee, que riches ne feuſſions ? Le moyen eſt facile, & de couſt bien petit. Et doncques telle eſt on temps præſent la reuolution des Cieulx, la conſtellation des Aſtres, & aſpect des Planettes, que quiconques coingnee perdera ſoubdain deuiendra ainſi riche. Hen, hen. Ha, par Dieu, coingnee vous ſerez perdue, & ne vous en deſplaiſe. Adoncques tous perdirent leurs coingnees. Au diable l’vn à qui demoura coingnee. Il n’eſtoit filz de bonne mere, qui ne perdiſt ſa coingnee. Plus n’eſtoit abbatu, plus n’eſtoit fendu boys on pays en ce defaulct de coingnees. Encores dict l’Apologue Æſopicque, que certains petitz Ianſpill’hommes de bas relief, qui à Couillatris auoient le petit pré, & le petit moulin vendu pour ſoy gourgiaſer à la monſtre, aduertiz que ce theſaur luy eſtoit ainſi & par ce moyen ſeul aduenu, vendirent leurs eſpees pour achapter coingnees, affin de les perdre : comme faiſoient les payſans, & par icelle perte recouurir montioye d’Or, & d’Argent. Vous euſſiez proprement dict, que feuſſent petitz Romipetes vendens le leur, empruntans l’aultruy pour achapter Mandatz à tas d’vn pape nouuellement creé. Et de crier, & de prier, & de lamenter & inuocquer Iuppiter. Ma coingnee de cza, ma coingnee delà, ma coingnee ho, ho, ho, ho. Iuppiter ma coingnee. L’air tout au tour retentiſſoit au cris & hurlemens de ces perdeurs de coingnees. Mercure feut prompt à leurs apporter coingnees, à vn chaſcun offrant la ſienne perdue, vne aultre d’Or, & vne tierce d’Argent. Tous choiſiſſoient celle qui eſtoit d’Or, &