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chapitre xiii

ſainct Ligaire. arriuans à la caſſine de loing il apperceut Tappecoue, qui retournoit de queſte, & leurs diſt en vers Macaronicques.

Hic eſt de patria, natus de gente beliſtra,
Qui ſolet antiquo bribas portare biſacco.
[1]

Par la mort diene (dirent adoncques les Diables) il n’a voulu preſter à Dieu le pere vne paouure chappe : faiſons luy paour. C’eſt bien dict (reſpond Villon) Mais cachons nous iuſques à ce qu’il paſſe & chargez vos fuzees & tizons. Tappecoue arriué au lieu, tous ſortirent on chemin au dauant de luy en grand effroy iectans feu de tous couſtez ſus luy & ſa poultre : ſonnans de leurs cymbales, & hurlans en Diable. Hho, hho, hho, hho : brrrourrrourrrs, rrrourrrs, rrrourrrs. Hou, hou, hou, Hho, Hho, hho : frere Eſtienne faiſons nous pas bien les Diables ?

La poultre toute effrayee ſe miſt au trot, à petz, à bonds, & au gualot : à ruades, freſſurades, doubles pedales, & petarrades : tant qu’elle rua bas Tappecoue, quoy qu’il ſe tint à l’aube du baſt de toutes ſes forces. Ses eſtriuieres eſtoient de chordes : du couſté hors le montouoir ſon ſoulier ſeneſtre eſtoit ſi fort entortillé qu’il ne le peut oncques tirer. Ainſi eſtoit trainné à eſcorchecul par la poultre touſiours multipliante en ruades contre luy, & fouruoyante de paour par les hayes, buiſſons, & foſſez. De mode qu’elle luy cobbit toute la teſte, ſi que la ceruelle en tomba près la croix Oſaniere[* 1], puys les bras en pièces, l’vn ça, l’aultre là, les iambes de meſmes, puys des boyaulx feiſt vn long carnaige, en ſorte que la poultre au conuent arriuante, de luy

  1. Croix Oſanniere. en Poicteuin, eſt la croix ailleurs dicte Boyſſeliere : pres laquelle au dimenche des rameaux lon chante. Oſanna filio Dauid. &c.
  1. Hic… biſacco. « Celui-là est de patrie et de race bélitre, qui a coutume de porter des bribes dans un antique bissac. »