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le qvart livre

ce que auons, tout ce que eſperons eſt luy, en luy, de luy, par luy. C’eſt le bon Pan le grand paſteur qui comme atteſte le bergier paſſionné Corydon, non ſeulement a en amour & affection ſes brebis, mais auſſi ſes bergiers[1]. A la mort duquel feurent plaincts, ſouſpirs, effroy, & lamentations en toute la machine de l’Vniuers, cieulx, terre, mer, enfers. A ceſte miene interpretation compete le temps. Car ceſtuy treſbon treſgrand Pan, noſtre vnique Seruateur[2] mourut lez Hieruſalem, regnant en Rome Tibere Cæſar.

Pantagruel ce propous finy reſta en ſilence & profonde contemplation. Peu de temps apres nous veiſmes les larmes decouller de ſes œilz groſſes comme œufz de Auſtruche. Ie me donne à Dieu, ſi i’en mens d’vn ſeul mot.


  1. Ses brebis, mais auſſi ſes bergiers.

    ...Pan curat oves oviumque magistros.

    (Virgile, Églogues, II, v. 33)
  2. Noſtre vnique Seruateur. Cette interprétation est ancienne. Du Fail, qui l’expose tout au long dans son Epiſtre de Polygame à vn Gentilhomme contre les athees (t. II, p. 339), commence ainsi : « I’ay ſemblablement penſé eſtre de mon deuoir, vous parler d’vne hiſtoire grande & illuſtre, que Plutarque raconte au liure de la ceſſation des Oracles : laquelle, au iugement d’Euſebe, Pierre le Cheuelu Italien, & Pierre Meſſie Eſpagnol, ſe rapporte & approprie à noſtre propos. »