Comment Pantagruel deſcendit en l’iſle des Papefigues[1].
Chapitre XLV.
v lendemain matin recontraſmes l’iſle des Papefigues. Lesquelz iadis eſtoient riches & libres, & les nommoit on Guaillardetz, pour lors eſtoient paouures, mal heureux, & ſubiectz aux Papimanes. L’occaſion auoit eſté telle. Vn iour de feſte annuelle à baſtons, les Bourguemaiſtres, Syndicz & gros Rabiz Guaillardetz eſtoient allez paſſer temps & veoir la feſte en Papimanie, iſle prochaine. L’vn d’eulx voyant le protraict Papal (comme eſtoit de louable couſtume publicquement le monſtrer es iours de feſte à doubles baſtons) luy feiſt la figue[2]. Qui eſt en icelluy pays ſigne de contempnement & deriſion manifeſte. Pour icelle vanger les Papimanes quelques iours apres ſans dire guare, ſe mirent tous en armes, ſurprindrent, ſaccaigerent, & ruinerent toute l’iſle des Guaillardetz : taillerent à fil d’eſpee tout home portant barbe. Es femmes & iouuencaulx pardonnerent auecques condition ſemblable à celle dont l’empereur Frederic Barberouſſe iadis vſa enuers les Milanois[3].
Les Milanois s’eſtoient contre luy abſent rebellez,
- ↑ L’iſle des Papefigues. La Fontaine a imité ce chapitre et les deux suivants dans son Diable de Papefiguière.
- ↑ Luy feiſt la figue.
Firent la figue au portrait du ſaint Pere.
- ↑ Iadis vſa enuers les Milanois. Voyez Albert Krantz, Saxonia, liv. VI, c. 6, et Guillaume Paradin, De antiquo Burgundiæ ſtatu, Lyon, Étienne Dolet, 1542.