Page:Rachilde - À mort, 1886.djvu/104

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merveilleux, je m’exalte, je m’enflamme, je gesticule, je suis heureux…

J’achète généralement tous les livres qui paraissent ou à peu près. Mais je ne lis point les journaux lorsque je suis décidé à lire mes livres. Je me borne donc à les juger moi-même, ce qui est une douce besogne, je vous assure, et n’a rien d’aussi fatigant que le disent messieurs les critiques. Si l’un de ces romans me plaît, l’auteur en fût-il aussi inconnu que Jean-Jacques Rousseau peut l’être de vous, Madame, je le classe parmi les meilleurs ouvrages de mon époque.

Je ne tiens nullement, veuillez le croire, à vivre au rebours du monde parisien, pas plus du reste qu’à exagérer l’originalité intelligente de ce même monde. Je me sens un fils de 1830, voilà tout.

Je tiens surtout à ménager mon âme : tous les excès de sensualisme cérébral me répugnent. Il y a des moments, chère Madame, où, si je l’osais, je crierais, debout sur un char lancé à fond de train : Vive le juste milieu ! afin que ma voix se répandît de tous les côtés.

Je m’explique :

Cette intéressante vieille personne que vous nommez Olga Freind, m’a brusqué l’entendement de telle sorte que je n’ai pu me résoudre à lui répondre ; je lui ai paru fort impoli, je vous en fais mes excuses, mais j’ai aperçu en elle le triste résumé de tous les excès qui me font peur. Elle est vieille, elle paraît jeûné : excès. Elle est couperosée, elle se farde : excès.