Page:Rachilde - À mort, 1886.djvu/180

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tellement grand qu’elle ne pouvait que le rapetisser par son contact, et se pencher sur elle, c’était l’embrasser, elle le savait bien.

Ils parcoururent le foyer, et au bout d’un quart d’heure ils virent Jean Soirès devant la cheminée : le banquier avait la mine d’un homme arrivé au paroxysme de l’exaspération.

Desgriel cherchait à le calmer ; le vieux général le tirait par une manche, tandis que le vicomte de Raltz-Mailly le suppliait de se taire.

Soirès avait bu pas mal de champagne dans ses perquisitions désordonnées, et le gommeux Victor prétendait que cela tournerait au vilain. Un journaliste, donnant le bras à un domino de dentelle blanche qui n’était autre qu’Olga Freind, expliquait que les manteaux rouges ne fourmillaient vraiment pas : on le lui avait tout simplement enlevé. Le comte fendit la presse, il se démasqua.

— Monsieur Soirès, dit-il avec une exquise courtoisie, je vous ramène votre compagne. Elle est très fatiguée, je crois, et vous devriez bien lui permettre de partir.

— Quoi… qu’est-ce que c’est ?… vous me ramenez Madame, vous… Sacrebleu ! Monsieur le comte, vous y avez mis le temps.

— Pardon, mon cher Soirès… lorsqu’une femme est souffrante comme paraît l’être Madame, je mets à vous la ramener tout le temps nécessaire…

On avait formé le cercle, une collision semblait inévitable. Berthe, les paupières closes, se serrait