Page:Rachilde - L’Animale, 1923.djvu/230

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Lion l’escortait fièrement, jouait à cache-cache derrière les cheminées ; folâtrait sur les glissoires du toit de verre et suivait ses chattes qui, quelquefois, le menaient loin. Alors la jeune femme s’étendait de tout son long, en bâillant d’angoisse nerveuse. Elle prenait un véritable bain de rayons blancs, se tournant et se retournant dans la fraîcheur stellaire comme dans une onde où se seraient mollement défilés des colliers de perles. Elle regardait la ville obscure du haut de sa terrasse fragile, avec le dédain qu’ont certains petits enfants pour les trop grands objets qu’ils savent ne pouvoir porter de leurs deux mains.

Après tout, vu des astres, Paris était bien sombre, bien boîte close. Une fumée tordue et rabattue sur lui suffisait à le plonger dans le néant. S’il brûlait par échappée, c’était comme une cassolette de bronze couvant des parfums délétères sous une cendre ; et elle fronçait les narines en respirant le douteux parfum des rues qui montait humblement jusqu’à elle, l’idole faite pour les aromes vivifiants des forêts.

En regardant bondir le chat, elle murmurait, s’étirant les membres :

— Non, les hommes ne sont pas dignes de mes ardeurs, et je ne veux plus m’égarer encore à fouiller ce cloaque. Je suis lasse… Tant pis ! Que cela finisse comme ça voudra.

Elle se disait qu’à culbuter la fourmilière d’un coup de talon elle n’en verrait jamais jaillir l’amant