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Page:Rachilde - L’Hôtel du grand veneur, 1922.djvu/112

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cours d’Europe, il écrivait à son notaire pour chercher à savoir si Mme Lionnelle, dont il suivait la vie mondaine par les chroniques du Tout Paris, ne voulait point lui revenir.

Lionnelle, qu’on appelait Lion, dans l’intimité, était d’un caractère essentiellement libre. Elle avait le teint bistré des gitanes, des yeux d’un bleu d’étang et les cheveux courts, un peu ondulés. Elle était de taille moyenne, comme ramassée sur elle-même, prête à la détente du bond qui la faisait absolument redoutable pour ceux qui ne la comprenaient point. Ou il fallait se fâcher ou il fallait plier. On l’aurait volontiers battue dans tous les cas. Son exotisme bien français lui avait acquis une réputation détestable d’étrangère originale, probablement dangereuse. Était-ce l’aventurière, était-ce la névrosée ? Le point noir de cette bizarre existence grossissait au fur et à mesure que sa fortune diminuait, ou qu’elle paraissait fondre, car la duchesse de Montjoie gardait une maison, un train, qu’elle ne se souciait même pas de soutenir. Pour ne pas répondre aux lettres de change de son mari, la duchesse Lionnelle s’était offert un intendant. Selon la propre expression de ce