Aller au contenu

Page:Rachilde - L’Hôtel du grand veneur, 1922.djvu/217

La bibliothèque libre.
Cette page n’a pas encore été corrigée

— Nous avons le temps, tu peux t’expliquer à ton aise et je ne me priverai point de t’écouter encore chanter, mon oiseau d’amour, ma bestiole toquée, qui n’a, décidément pas tout l’orgueil que je voudrais garder à sa place. Ah ! c’est bien utile d’être duchesse pour devenir jalouse d’une servante d’auberge, d’une fille à tout le monde. Non ! C’est malheureux de voir ça !

Mme de Montjoie ferma les yeux et se blottit dans les bras de l’assassin. Elle pleurait, riait, divaguait, rejetant en arrière ses courts cheveux ondés.

— Non ! je ne m’en irai pas tout de suite, mais je veux que tu me comprennes bien. Je ne suis pas venu te chercher, ici. Je voulais savoir si tu m’avais trompée ! Cette pauvre petite servante… Ah ! comme je l’aurais tuée, si je l’avais découverte, là, à ma place, dans tes bras…

— C’est bien ce que je te disais ! La jalousie… et la tuerie, par-dessus le marché. On est à deux de jeu, quoi. Nous sommes du gibier de bagne et je ne sais pas du tout lequel rendra le mieux dans un mois, en face des juges. Si on s’aimait, dis, pour oublier tout ça ?